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Scouts de l'Air

 

 

 

Scouts de l air

 

 

Paru le dimanche 17 août 1947 dans le n°12 du quotidien "Jamboree-France"

 

 

 Jeudi, un planeur des scouts de l’air se posait dans l’arène. Hier c’était la journée des ailes scoutes et les routiers parachutistes tombés du ciel envahissaient subitement l’enceinte du Jam. En dépit des difficultés innombrables que rencontrent actuellement les fervents de l’aviation lorsqu’ils prétendent voler, les « scouts de l’air » existent donc et peut-être avez-vous remarqué certains d’entre eux reconnaissables aux ailes qui ornent leur insigne de poitrine. Nous nous sommes demandé quelle était exactement l’activité aérienne et scoute de ces garçons. Pour vous le dire,

 

« Jamboree-France » est allé vivre une matinée avec les scouts de l’air de la région parisienne.

A Mantes, un dimanche matin, neuf heures. Le terrain où nous nous trouvons est réservé à un interclub, groupant plusieurs aéro-clubs régionaux, dont l’« Aéro-Club du Scoutisme Français ». Près des hangars, nous apercevons plusieurs planeurs et même un appareil à moteur, un biplan « Stamp ».

Quant aux garçons, ils assiègent pour l’heure en groupe compact et animé le secrétaire chargé d’établir la « liste des vols », c’est-à-dire de donner à chaque scout son tour de vol sur le planeur-école. La fameuse liste est sans doute terminée car les garçons s’envolent déjà ( c’est une métaphore! ) vers les hangars voisins. Abordons le chef en préparant nos insidieuses questions…

 

- Pour « Jamboree-France »… Vous permettez ?

Tout d’abord : j’ai remarqué sur les chemises de vos scouts les insignes des trois associations du Scoutisme Français… 

- En effet, notre groupe comprend des E.D.F., des S.D.F., des E.U. Ce sont uniquement des Routiers…

Nous nous avançons vers le planeur le plus proche. Les uniformes ont déjà disparu sous les combinaisons de vol.

- Voici l’un de nos planeurs-écoles. Un C-800. Il est biplace et à doubles commandes. Son lancement est opéré, selon la méthode classique, par un treuil automobile…

Je trouve la dénomination et l’appareil bien « mathématique » pour désigner un engin aussi fin et gracieux.

- Quel sont vos moniteurs ?...

- Des scouts, anciens pilotes de guerre. Tenez, vous arrivez bien. Vous allez assister à un tout premier vol d’initiation…

 

Le planeur a été amené à l’extrémité de la piste, face au vent. Le moniteur scout prend place dans la cabine, avec un jeune routier.

Tous deux attachent les bretelles de leur parachute.

- De gauche à droite – c’est le moniteur qui parle – sur le tableau de bord, tu as le « badin » qui t’indique ta vitesse par rapport au vent, le variomètre : indicateur de pente, l’altimètre…

Ces pédales, c’est le palonnier qui commande le gouvernail de direction…

Attention… Prêts ?... Panneau !...

 

Un routier relève le bout de l’aile du planeur ( la « plume » me souffle le chef ) et maintient la voiture en position horizontale. Un autre routier agite doucement au-dessus de l’aile un disque vert et rouge.

A l’autre bout de la piste, le treuil embraye, le câble de remorquage se tend, le planeur démarre, glisse doucement sur l’herbe de la piste avec un murmure de soie froissée. Quelques mètres accomplis avec la majesté d’un cygne…

Il décolle, il a décollé!...

Assez fortement cabré, le léger engin grimpe jusqu’à 150 mètres d’altitude.Tout le monde resté sur la piste a les yeux au ciel, les mains en abat-jour.

- Si les ascendances sont favorables, me dit mon guide sympathique, ils peuvent tenir l’air de sept à douze minutes…

 

Moisson

Vue aérienne du Jamboree de Moisson

 

Le câble est retombé à terre comme un long serpent filiforme. Tout là-haut, le C-800 vire à droite, à gauche, fait une ligne droite, amorce un piqué puis une longue descente en S…

Il paraît étonnamment souple et maniable… Mais revenons sur terre…

- Vous avez également, je crois, du matériel à moteur ?

- Le « Stamp » que vous voyez là appartient au Scoutisme français.

Malheureusement, les frais de carburant, d’entretien et d’assurances demeurent élevés… surtout pour les bourses de nos scouts.

Il est toutefois des « mordus » qui consacrent tout ce qu’ils peuvent économiser sur leur salaire à se payer des heures de vol. Tous, hélas! ne gagnent pas encore d’argent…

De nos jours, c’est devenu un luxe que de s’offrir un brevet de pilote à moteur…

 

Au loin, le planeur s’est posé, glissant doucement sur son patin. Des routiers en tenue légère le halent déjà, le préparent pour son prochain vol. Je prends congé…
Savez-vous, habitants temporaires de « Moissonville », que vous pouvez, pour quelque centaines de francs à peine, survoler le Jam et faire ainsi, en un « temps » imbattable, le tour du monde ?
Un bon moyen de pulvériser le record du « Reynold’s Bombshell » !...
 
 
                                                                          Jean-Pierre Léon et Georges Ferney